"You're my treasure, you know"
Il avait les yeux embués un peu par l'alcool de prune.
Mais il l'a dit en me regardant.
J'ai cru que je ne saurais jamais me retenir de pleurer,
car jamais mon père ni aucun autre homme ne m'avait dit ça.
Toujours je me souviendrai de ce restaurant de sushi dans lequel Tetsu m'a dit ça,
les clins d'oeil du cuisinier qui me demandait ce qui me ferait plaisir,
mon doigt tendu vers un maquereau tout cru, tout frais, en souriant.
Ses messes basses avec la serveuse pour qu'elle aille chercher,
spécialement pour me faire plaisir, dans la réserve,
un petit alcool chinois horriblement sucré
mais qui avait un gout de fleur renversant.
Et aussi son petit palm dans lequel il avait conservé précieusement mon petit dessin.
En pleurant toutes les larmes de mon coeur, intérieurement, je me souvenais que ce dessin je l'avais fait quand j'avais 8 ans.
Et que toutes ces années, il l'avait gardé.
Et quand j'allais mal, ses mots rassurants, justes, doux.
Sa maison géométrique pour abri.
Tetsu, mon papa d'un autre pays.
Un faux papa, mais un vrai père.
Alors depuis quelques heures j'ouvre mon mail chaque minute
en espérant qu'il ait répondu à mon petit mot.
Parceque je n'ai pas envie d'apprendre un malheur par hasard
en cherchant son nom sur le net.
Parceque ça me tue de lire autant de pages sur lui, le fameux, le connu, le brillant, le reconnu-qui-nous-a-fait-le-bonheur-d'assister-à-ce-grand-événement.
Tous ces gens qui l'ont vu et moi, depuis tant de temps, rien.
Parceque le temps ne s'arrête pas, même quand on n'a pas de nouvelles.